CGT Educ’ 93 : une CE et un congrès confédéral encadrés par la lutte des classes

P.Martinez, secrétaire général de la CGT reçu à l'Elysée par E.Valls et M.El Khomri

Par Griselda

Le jeudi 10 mars s’est tenue à la Bourse du Travail de Saint-Denis la Commission Exécutive (CE) de la CGT Educ’ 93 pour préparer le 51ème congrès confédéral de la CGT qui aura lieu à Marseille du 18 au 22 avril 2016. Cette CE, tout comme le congrès confédéral, sont encadrés par la lutte des classes. La veille de cette CE, il y a eu 500 000 manifestants dans toute la France, dont 100 000 jeunes, pour le retrait de la loi El Khomri. Or, nous le savons tous, c’est la mobilisation des travailleurs qui a imposé cette exigence, mettant dos au mur les directions syndicales confédérales, en particulier la CGT.

Un rapport d’activité et un document d’orientation majoritairement rejetés !

Dès le début, plusieurs militants sont intervenus pour dénoncer le rapport d’activité et le document d’orientation. Pour ma part, j’ai dénoncé le fait que le document d’orientation ne répondait pas à la situation et aux nécessités du mouvement ouvrierK: rien sur la loi El Khomri, rien sur l’état d’urgence, rien sur la répression syndicale, rien sur les Air France et les Goodyear …

Les militants syndicaux se sont saisis du débat sur le texte pour dénoncer le rôle de la direction confédérale. En effet, lors des dernières mobilisations, celle-ci n’a pas mobilisé dans ses rangs pour faire reculer le gouvernement. Les interventions ont cité en particulier la mobilisation contre la loi Macron, la mobilisation contre la loi Touraine dans les hôpitaux, et cet été la mobilisation en soutien au peuple grec.

Pour finir, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a fait une déclaration à la fin de la manifestation du 9 mars. Cela a également été dénoncé car il s’exprimait clairement pour une réécriture de la loi El Khomri. Les syndicalistes présents ont vu dans cette déclaration une manœuvre pour donner une porte de sortie au gouvernement.

Mais cette déclaration a également été dénoncée comme un non-respect de la démocratie ouvrière des structures syndicales, car la très grande majorité des militants de la CGT à travers les motions, les AG et dans les cortèges, se sont exprimés pour le retrait pur et simple de la loi.

A la fin de ce premier débat, il était devenu impossible pour la direction départementale de la CGT Educ’ 93 de défendre le texte, car cela aurait signifié cautionner la politique de la direction confédérale. C’est donc sous la pression de la lutte des classes et des militants, que la direction départementale, minoritaire, a retourné sa veste et « admis » qu’ils ne pouvaient pas voté POUR le texte, et a appelé à voter CONTRE. Le texte a été rejeté à l’unanimité!

L’union Européenne, la Confédération européenne des syndicats…

L’aiguisement de la lutte des classes en Europe, et plus particulièrement la nouvelle situation de crise qui s’est ouverte après l’élection d’Alexis Tsipras cet été, a montré à une très grande partie des travailleurs et de la jeunesse le véritable visage de l’Union Européenne : raciste, anti-démocratique et profondément capitaliste, qui plonge les peuples d’Europe dans une course à la misère. Lors des débats, des interventions, dont la mienne, ont dénoncé le rôle de l’Union Européenne et de la Confédération européenne des syndicats (CES) .

La position de la direction confédérale est d’en appeler à une meilleure coordination des syndicats au sein de la CES. C’est aussi celle de la direction départementale et des secteurs néo-réformistes ( PG, NPA) qui ont appelé à la création de larges fronts contre l’austérité intégrés aux institutions européennes. Je suis intervenue pour expliquer que la CES n’était pas une organisation syndicale, mais un organe des institutions européennes.

Cela signifie concrètement, que la CES est un outil pour appliquer la politique de l’Union Européenne, c’est-à-dire une politique de « concurrence libre et non faussée », et qui prône le « dialogue social », synonyme de collaboration de classe, entre syndicats, patrons, gouvernements et UE. Exiger de la CES qu’elle se comporte comme un syndicat, cela revient à créer l’illusion qu’il existerait des institutions démocratiques au sein de l’UE. Cela signifierait qu’il existe des organes qui pourraient défendre les intérêts de la classe ouvrière et par conséquent s’opposer aux orientations du FMI et de la BCE.

Il n’y a rien de plus faux. C’est pour cela qu’il nous faut exiger de nos directions syndicales qu’elles organisent les salariés et les mobilisations en toute indépendance de ces institutions européennes, en particulier de la CES. En défendant cette orientation, d’autres militants CGT, lutte de classes, sont intervenus dans le même sens, en appelant à quitter la CES. Malgré les manoeuvres de la direction départementale, nous avons gagné le débat et ma proposition d’amendement a été adoptée. [voir ici ]

et le « syndicalisme rassemblé » dénoncés !

Dans les débats, un amendement a été proposé pour supprimer toute référence au syndicalisme rassemblé dans l’ensemble du document d’orientation, ainsi que dans les résolutions. Je suis intervenue pour soutenir cette proposition d’amendement.

Le syndicalisme rassemblé est une stratégie visant à rapprocher la CGT et la CFDT, parce qu’il s’agirait actuellement des deux confédérations syndicales majoritaires dans la classe ouvrière. Derrière cette soi-disant démarche unitaire, l’objectif est de liquider la CGT qui est le syndicat historique de la classe ouvrière en France. La CFDT, issue du syndicalisme chrétien, n’a pas vocation à défendre les intérêts matériels et moraux des travailleurs face à l’exploitation des capitalistes.

À travers le syndicalisme rassemblé, il s’agissait de peser sur l’orientation de la CGT pour aller vers un « syndicalisme de service », ou un syndicalisme de « concertation », comme le préconisent toutes les institutions capitalistes, sur le modèle allemand ou scandinave. D’autres interventions ont mentionné que le syndicalisme rassemblé « tuait la CGT », et ont fait le bilan de ce syndicalisme rassemblé : défaite sur la mobilisation des retraites en 2003, puis en 2010, défaite sur la loi Macron, soutien au gouvernement sur la loi El Khomri.

Des membres de la direction départementale ont accusé cet amendement d’être une position sectaire face aux bases de la CFDT. Plusieurs d’entre nous ont répondu que nous condamnions la direction confédérale, mais que nous appelions les syndiqués en opposition avec l’orientation de la direction de la CFDT, à discuter avec nous et à rejoindre les rangs de la CGT. Les militants avaient compris les enjeux du débat. L’amendement pour la suppression à toute référence au syndicalisme rassemblé a été adopté à l’unanimité !

Les trois amendements proposés ont été adoptés :

Amendement 1 :

Pour un syndicalisme qui équilibre institutionnel et temps passé auprès des salariés, la CGT et ses syndicats s’engagent « à se retirer des instances auxquelles sa participation remettrait en cause son indépendance par rapport à l’état et par rapport au patronat ».

Amendement 2 :

Pour un syndicalisme de transformation sociale de la société dans un monde globalisé, la CGT et ses syndicats s’engagent « à agir pour un syndicalisme européen indépendant des institutions de l’Union Européenne ».

Amendement 3 :

Cet amendement concerne l’adhésion à la CGT des anciennes organisations syndicales des DROM (Départements et régions d’Outre Mer), pour des raisons de représentativité lors des élections professionnelles.

Autrefois, toutes ces organisations syndicales étaient adhérentes à la Fédération Syndicale Mondiale (FSM) dirigée politiquement par les secteurs de la IIIe Internationale, sans aucun lien de subordination entre elles. Pour empêcher tout lien de subordination entre la CGT et les syndicats des colonies, nous tenions à rappeler que leur adhésion à la confédération s’inscrit dans le combat historique de la classe ouvrière pour l’indépendance des colonies.

Lors du débat, il s’est avéré, que le secrétaire national de la CGT Educ’, avait lui-même eu les mêmes inquiétudes lors des réunions préparatoires. L’amendement a donc été adopté à l’unanimité. Les rapports entre les cinq centrales (CGT, CGTG, CGTM, CGTR, UTG) doivent se renforcer et se développer dans le respect absolu de l’indépendance de chacune, « se fondant sur la lutte contre le colonialisme et les libertés des peuples à revendiquer leurs droits à l’indépendance et à l’autodétermination».