Non à la hausse des frais d’inscription !
Interview de Keno, militant à Solidaires étudiant-e-s Paris 3

Paris, le 29 janvier 2018.
L’Internationaliste : Où en est la mobilisation contre la hausse des frais d’inscriptions?
La hausse drastique des frais d’inscriptions est un aboutissement du processus de privatisation de l’université. Depuis la réforme Vidal, les étudiants sont désormais triés sur le volet à partir de critères sociaux, raciaux et patriarcaux : rappelons que près de 400 000 bacheliers sur 900 000 ont été refusés à l’entrée de l’université publique cette année. La hausse des frais d’inscriptions n’est ni plus ni moins que la suite logique de parcours Sup.
L’annonce de cette réforme en novembre dernier a suscité une très vive réaction au sein de l’université. Cette indignation générale ne s’est pas traduite en mobilisation massive car la mobilisation s’est heurtée aux mêmes obstacles qu’au printemps contre la loi Vidal : le comportement bureaucratique et sectaire des organisations militantes vis-à-vis des étudiants, les fermetures administratives.
Le campus de Censier à titre d’exemple est resté fermé du début du mois de décembre jusqu’aux vacances de noël par décision du Président, ce qui a empêché toute mobilisation dans l’université puisque la majorité des étudiants sont rentrés chez eux. De plus, aucune unité n’a été réalisée par les syndicats, (Unef pour les étudiants, CGT FERC Sup, FSU Snesup et FO pour les personnels) ; ni par les organisations de gauche sur la revendication centrale : non à la hausse des frais d’inscriptions.
En fait, l’intersyndicale et la Commune de Censier ( UNEF, Hamonistes, LFI, NPA, mouvance autonome …), a continué les mêmes manœuvres que l’année dernière : assemblées générales fantoche, blocage minoritaire, goûter festif, … tout pour ne pas organiser et construire la grève chez les étudiants, les personnels et les enseignants.
On aurait voulu tuer la mobilisation dans l’œuf, on ne s’y serait pas pris autrement !
2/ L’Internationaliste :Qu’avez-vous mis en place à Paris 3 ?
Dès l’annonce de la mesure par Édouard Philippe le 19 novembre, nous nous sommes attelés à réaliser un travail d’information par des diffusions de tracts et des interventions dans les TD et les amphis. Nous avons organisé une première réunion le 27 novembre qui a été un franc succès, beaucoup d’étudiants étrangers notamment y ont participé inquiets de leur avenir proche.
Nous avons alors lancé une pétition pour demander un engagement écrit de la présidence de Paris 3 pour qu’elle n’applique pas la hausse à la rentrée 2019. Cette pétition est le mandat que donne les étudiants au syndicat et au collectif unitaire pour la justice sociale.
Il s’agit de maintenir une pression sur la Présidence, mais surtout envers tous les élus qui se cachent dans les instances universitaires au lieu de mobiliser sur le terrain.
Ainsi depuis le début de la mobilisation au mois de novembre, on voit fleurir des motions, des tribunes dans les milieux bourgeois universitaires … et même dans le show business !
Face à la pression des étudiants, l’ancien président Carle Bonafous-Murat (remplacé provisoirement par Raphael Costambeys-Kempczynski en janvier) avait déclaré être contre la hausse, sans pour autant donner aucune garantie face à l’application de la réforme en septembre prochain.
Nous ne sommes pas dupes, c’est cette même personne qui a tout fait pour appliquer Parcours Sup en 2018, qui a envoyé la police sur les étudiants et demandé la mise sous tutelle de l’université par l’État. C’est pourquoi nous n’attendons pas des paroles, mais des actes !
Et nous dénonçons le sectarisme et l’opportunisme de tous les élus et tous les militants qui mènent une véritable politique de désinformation sur la fac, en faisant croire aux étudiants que ces motions votées, sont suffisantes pour obtenir gain de cause !
3/ L’Internationaliste :Qu’avez-vous à dire par rapport au mouvement des Gilets jaunes ?
Le syndicat et le collectif unitaire pour la justice sociale, soutiennent pleinement ce mouvement, car encore une fois, l’unité est de mise face au gouvernement Macron.
Ayant vu la répression à l’oeuvre dans les mouvements lycéens et étudiants, notamment Arago ( 22 mai) et Mantes ( 6 décembre) la Jolie, je suis particulièrement frappé par cette nouvelle escalade des brutalités que subissent les gilets jaunes.
Les forces de police dans les manifestations font preuve d’une violence inouïe depuis le début du mouvement. On dénombre actuellement près de 2000 blessés selon le ministère de l’Intérieur. De plus, la plupart des sources parlent d’une centaine de blessés graves au bas mot. Ce sont des personnes qui ont perdu un œil, un membre ou sont hospitalisés suite à un tir dans le crâne !
L’appareil d’État utilise toutes les forces dont il dispose actuellement pour réprimer le mouvement. Judiciairement, il poursuit les militants comme on a pu le voir avec le procès d’Eric Drouet. Il déclare également interdites dès que possible les manifestations sur simple décision du préfet.
Par la violence, il attaque les Gilets jaunes dans la rue en déployant des canons à eau ou des chars, en utilisant des grenades lacrymogènes et des flashballs. Les figures connues du mouvement sont visées comme en atteste Jérôme Rodrigues qui a perdu un œil le 26 janvier dernier par un tir de flashball en plein visage !
La meilleure réponse face à cette répression, c’est la mobilisation, pour des condamnations exemplaires des coupables et la relaxe de tous les inculpés !
4/ L’Internationaliste :Quelle perspective proposez-vous ?
Chez les étudiants, la mobilisation s’est affaiblie depuis les vacances mais peut repartir à tout moment au vu de l’état d’esprit général. Nous continuons notre travail de terrain, car la mobilisation à l’échelle locale – avec des assemblées générales massives et véritablement démocratiques ! – est la condition pour une mobilisation nationale. On ne peut pas se dire syndicaliste et ne pas mobiliser sur son lieu d’étude !
C’est pourquoi nous continuons à appeler à l’unité de toutes les organisations militantes à Paris 3 contre la hausse des frais d’inscriptions en vue d’Assemblées Générales massives. Nous préparons activement la grève le 5 février prochain ; nous appelons toutes les organisations militantes à faire de même.