Revue de Presse Sociale – Mai 2017

«La lutte de classe est nationale dans sa forme et internationale dans son contenu» K. Marx
Commençons cette rubrique par une mention à la journée nationale de grève qui s’est déroulée au Brésil, le 28 avril, la première depuis 21 ans dans le pays. Les principaux syndicats du pays appelaient les travailleurs à faire grève et à manifester contre les projets anti-ouvriers du président M. Temer.
En tout plus de 40 millions de grévistes ont été recensés et le pays a été paralysé. Les écoles, la poste, les banques, les hôpitaux des principales villes ont été fortement perturbés dans les grandes villes du pays.
Malgré le caractère massif de la grève, les directions syndicales qui ne veulent pas aller plus loin ont simplement menacé le gouvernement de nouvelles actions sans définir de prochaine échéance.
La situation politique et sociale en Europe a été dominée par la situation française. Le premier tour de l’élection présidentielle française a été marquée par une explosion du paysage politique de ce pays et par une forte polarisation.
Sur le terrain de la lutte des classes, on a assisté a un niveau de combativité très élevé de larges secteurs de la classe ouvrière et il n’y a pas eu de trêve sociale pendant la période électorale, malgré les tentatives de démobilisations des travailleurs de la part des directions syndicales.
En effet, et c’est un élément inédit de l’histoire récente en France, avant et pendant le scrutin les très nombreuses luttes quotidiennes se sont poursuivies. Ces milliers de travailleurs qui ont fait grève au mois d’avril et au début du mois de mai ont rejeté le « front républicain » pour défendre leurs intérêts sur le terrain de la lutte des classes, défiant ainsi les positions de collaboration de classe de certaines directions syndicales, qui appellent « à voter Macron pour battre Le Pen ».
Regardons quelques conflits qui se déroulent en France dans plusieurs secteurs à seulement quelques jours du second tour de l’élection présidentielle.
Le conflit qui a eu le plus de visibilité dans les médias a été la lutte des Whirlpool d’Amiens. Les ouvriers de cette usine se sont mis en grève le 24 avril pour protester contre la délocalisation de leur usine en Pologne. Après 10 jours d’arrêt de travail, les salariés du site ont cessé le mouvement après avoir trouvé un « accord » avec la direction.
Plutôt que d’accord il faudrait parler de signature sous la contrainte puisque entre les ouvriers du site, les intérimaires et les sous-traitants ce sont plus de 600 personnes qui vont perdre leur emploi.
L’issue de ce conflit est surtout le résultat de l’absence totale de soutien de la part des directions syndicales nationales. Le secrétaire général de la CGT, P. Martinez, aurait été plus inspiré de mener la lutte contre les délocalisations, plutôt que d’appeler à voter Macron pour « combattre » Le Pen.
Les conflits ont touché plusieurs sites industriels. Le 5 mai, à l’appel du syndicat FO, 90 % des employés de la raffinerie de Feyzin dans le Rhône ont cessé le travail pour exiger de meilleures conditions de travail et le versement d’une prime de 1000 euros. La raffinerie a été mise à l’arrêt par les grévistes, entraînant la suspension des livraisons de produits pétroliers.
Le 4 mai, la cartonnerie Lamirande à Exideuil-sur-Vienne (Charente) a été touchée par un mouvement de grève. 95 % des ouvriers du site, soit 140 personnes ont cessé le travail à l’appel de la CGT, pour exiger des augmentations de salaires
Les mouvements de grève touchent également le commerce, la grande distribution et la logistique. Ainsi, plusieurs centaines d’employés de Tati ont fait grève et se sont rassemblés à Paris, devant le magasin historique de l’entreprise à Barbès, pour dénoncer les menaces qui pèsent sur leur emploi. En raison de la gestion de la direction, l’entreprise se trouve dans une situation financière critique et plusieurs centaines d’emplois pourraient être supprimés et des magasins fermés.
Chez Ikea, les employés des entrepôts français de l’entreprise (Châtres, Metz, Lyon et Fos-sur-Mer) se sont mis en grève le 5 mai pour protester contre la réduction de leur prime d’intéressement qui est passée de plus de 1800 euros l’année dernière à 200 euros cette année. Le préavis de grève court jusqu’au 15 mai.
Les mouvements de grèves touchent également les collectivité locales, qui ont été particulièrement touchées par les effets de la décentralisation et des coupes budgétaires opérées par les gouvernements successifs. Les agents des piscines de Brest, ont observé une grève depuis le 8 mars, et ont réussi à obtenir quelques avancées comme la création de deux postes et l’embauche d’un contractuel.
350 agents de la Communauté de Communes de Gap ont décidé d’entamer une grève illimitée à compter du 5 mai. Plusieurs services de la collectivité ne sont pas assurés comme par exemple la collecte des ordures ménagères.
Plusieurs crèches et les stades de la ville sont fermés. Les grévistes réclament le retrait immédiat du « plan contre l’absentéisme » que la municipalité veut imposer.
Les agents de la ville de Lyon ont entamé une grève le 4 mai, qui a été reconduite les jours suivants, pour exiger des meilleures conditions de travail et des augmentations de salaire. La grève a été lancée par une intersyndicale CGT, CFDT, UNSA, Sud, FO, CFTC, UNICAT. Tous les services ont été touchés par les arrêts de travail, en particulier les restaurants scolaires.
Le secteur de la santé a également été durement touché par les politiques gouvernementales. C’est un des secteurs qui connaît le plus de grèves depuis le début de l’année 2017. Le vendredi 5 mai, sur le site de l’établissement public de santé mentale (EPSM), à Allonnes, plus de 200 personnes ont participé à un arrêt de travail, à l’appel de l’intersyndicale CGT-FO-Sud.
Cette mobilisation visait à dénoncer un projet de suppressions de postes, ainsi que des fermetures de lits. Le mouvement de grève, devait être reconduit la semaine suivante.
En ce qui concerne les réductions d’effectifs, la direction de l’établissement prévoit de supprimer sept postes de psychologues sur 24 en pédopsychiatrie. D’après les représentants syndicaux, ces suppressions « rallongeraient l’attente de plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous (…) 768 enfants seraient laissés brutalement sans prise en charge ».
Les grévistes dénoncent également la fermeture de 19 lits. D’après une déléguée CGT : « On diminue la capacité hospitalière au motif qu’on prend le virage ambulatoire, mais là, c’est uniquement pour supprimer des postes, sans compensation ».
Les agents du port du Havre, en Normandie, ont fait une grève des heures supplémentaires et des opérations spéciales entre le 24 avril et le 4 mai pour exiger des embauches. Ils réclamaient 23 postes ils en ont eu 21. La grève a entraîné l’interruption de l’escale pour plusieurs paquebots de croisière.
Le 3 mai, 60 employés des restaurants McDonald’s de Soissons et Villers-Cotterêts, ont cessé le travail entre 11h et 14h pour exiger des hausses de salaire (13 euros de l’heure), un 13e mois et des meilleures conditions de travail. Un nouveau débrayage et un rassemblement sont prévus pour le 10 mai prochain, des travailleurs d’autres villes et d’autres enseignes de restauration rapide ont déjà signifié qu’ils se joindraient à ce mouvement de grève.
A l’aéroport de Roissy, 200 employés de l’entreprise de restauration Servair, qui fournit les plateaux-repas dans les avions, ont manifesté le 2 mai pour exiger de continuer à bénéficier des tarifs préférentiels pour les billets d’avion. En effet, dans le cadre du rachat de l’entreprise par un groupe chinois, les travailleurs de Servair risquent de perdre cet avantage.