Chine : Les travailleurs et les jeunes se soulèvent, ce n’est que le début !

En l’espace de quelques semaines, la situation politique et sociale en Chine s’est brutalement tendue, et la contestation contre la dictature dans ce pays a pris une ampleur inédite depuis la mobilisation de la Place Tian Anmen, à Pékin, en 1989.
Le 22 octobre dernier, à l’issue du XXe congrès du mal nommé Parti Communiste Chinois (PCC), Xi Jinping a été réélu secrétaire général de ce parti. Cette réélection a ouvert la voie à la possibilité de voir Xi Jinping devenir de facto président à vie de Chine. A l’occasion de ce congrès, le régime chinois a montré le renforcement de son caractère dictatorial, celui d’une dictature capitaliste.
Les principaux médias des puissances impérialistes ont interprété ce XXe congrès comme une démonstration de force de Xi Jinping et de ceux qui le soutiennent. Pourtant, l’examen attentif de la situation politique et sociale du pays, ainsi que la mobilisation de secteurs de la population chinoise ont montré que l’opposition à ce pouvoir dictatorial était profonde.
En effet pendant le congrès du PCC, des informations apparaissaient selon lesquelles les ouvriers de l’usine Foxconn dans la ville de Zhengzhou, avaient commencé à se mettre en grève dès le début du mois d’octobre.
Ils dénonçaient leurs conditions de travail, et en particulier, ils dénonçaient le fait qu’ils étaient enfermés dans des dortoirs, lorsqu’ils n’étaient pas sur les chaînes de production.
La direction de l’entreprise avait pris ces mesures afin d’empêcher que des foyers de Covid ne se développent parmi les travailleurs de l’usine et ne perturbe la production. Or cette usine, une des plus grandes au monde, avec près de 200 000 ouvriers, a une importance cruciale pour le capitalisme mondial.
En Effet, Foxconn, entreprise à capitaux taïwanais, est le principal producteur de pièces pour les i phones, et elle fournit également des composantes pour plusieurs grandes entreprises informatiques.
Les grèves pour dénoncer les mesures anti-covid mises en place par le régime dictatorial chinois, ou pour exiger des augmentations salariales se sont ensuite étendues à d’autres usines du pays, dans le courant du mois d’octobre et au mois de novembre.
Le 24 novembre dernier, un incendie a fait dix morts et neuf blessés dans un foyer à Urumqsi dans le XinJiang (région Ouïgour). En raison des mesures anti-covid prises par les autorités, les pompiers n’ont pas pu intervenir, ce qui explique que le bilan ait été aussi lourd.
En réaction au drame d’Urumqsi, des dizaines de milliers de personnes sont descendues pendant plusieurs jours dans les rues des grandes villes chinoises pour dénoncer les mesures anti-covid, les confinements drastiques et à répétition mis en place par le gouvernement et manifester leur solidarité avec les populations du Xinjiang.
Très vite, les manifestations ont pris un tour politique. Les manifestants, des étudiants, des ouvriers, des travailleurs ont repris des slogans dénonçant la politique dictatoriale du régime de Xi Jinping, en chantant l’Internationale, ou encore en criant « à bas le dictateur »
Les mouvements de contestations sont nombreux en Chine. Chaque année des milliers de mobilisations se déroulent dans les usines pour dénoncer les conditions de travail et réclamer des augmentations de salaire.
Dans les villes et dans les campagnes les mobilisations dénoncent les expropriations des petits propriétaires au profit des grands promoteurs immobiliers avec l’appui de la bureaucratie du PCC, ou encore pour dénoncer la corruption structurelle de cette même bureaucratie.
La mobilisation qui a commencé cet automne et qui s’est accélérée à partir du 24 novembre marque néanmoins un tournant dans la situation chinoise.
En effet, il s’agit d’une mobilisation d’ampleur nationale où la dictature capitaliste dirigée par le PCC, et en premier lieu par son secrétaire général, sont dénoncés.
Cette situation est inédite depuis la répression de la mobilisation démocratique de 1989, dont l’épicentre avait été la place Tian Anmen, à Pékin.
A cette époque, une très puissante mobilisation qui exigeait la démocratisation du pays, partie des milieux étudiants, rejointe ensuite par de larges couches des travailleurs, avaient ébranlé le régime dictatorial du PCC.
Après six semaines de mobilisation, Deng Xiaoping, celui qui avait été un des principaux artisans de la réintroduction du capitalisme en Chine à partir de 1979, avait ordonné la répression du mouvement.
Le 4 juin 1989, entre 5 et 10 000 personnes avaient été massacrées sur la place Tian Anmen, au cœur de Pékin, devant l’Assemblée du Peuple, le siège du PCC et l’entrée de la Cité interdite.
C’est donc la première fois depuis le massacre de Tian an Men, il y a 33 ans, qu’un mouvement de contestation politique d’ampleur nationale se produit.
Il est extrêmement significatif à plusieurs égards : cette mobilisation massive se fait alors que la censure et la répression sont terribles. Il se produit dans un contexte de crise économique et sociale aiguë qui s’exprime notamment par une crise bancaire et immobilière sans précédent.
Ce mouvement concentre les revendication ouvrières, les revendications des jeunes, mais aussi les revendications des minorités nationales opprimées.
C’est-à-dire que la mobilisation commencée le 24 novembre dernier se situe dans la continuité de la tradition révolutionnaire et démocratique chinoise de 1919, des grèves insurrectionnelles des années 1920, de 1989, ou des mobilisations récentes à Hong Kong.