8 mars 2020 : Grèves des femmes et mobilisations historiques

Manifestation féministe à Paris le 8 mars 2020 pour la journée internationale des droits des femmes

Par Loïc et Griselda

Le 8 mars, c’est la journée internationale de lutte pour le droit des femmes travailleuses. Cette année encore, et malgré la diffusion du coronavirus, des rassemblements et manifestations ont eu lieu dans de nombreux pays.

Au Chili qui compte 18 millions d’habitants, 3,5 millions de femmes ont manifesté – soit 19,4 % de la population ! (1) Les femmes occupent une place centrale dans le processus révolutionnaire en cours.

Manifestation féministe à Santiago au Chili le 8 mars 2020
Manifestation féministe à Santiago au Chili le 8 mars 2020

Au Mexique, la journée du 8 mars est fortement marquée par la lutte contre les féminicides. Dans ce pays où 10 femmes sont tuées par jour, les manifestantes continuent d’exiger des mesures du gouvernement afin de prévenir ces meurtres.

Lundi 9 mars, les travailleuses mexicaines étaient appelées à cesser toute activité (travail, corvées, études), avec le mot d’ordre : « « El nueve ninguna se mueve » (Le 9, aucune ne bouge). Il s’agit d’une première pour ce pays. Cette grève inédite dans le pays, a été très suivie, et une vague violette de manifestantes a ainsi parcouru le centre-ville de Mexico.

Mexico

A Lima, capitale du Pérou, 10 000 manifestantes ont défilé. Leurs mots d’ordre rejetaient à la fois les bas salaires et les violences patriarcales faites aux femmes : « Trabajadoras, sí; explotadas y violentadas, no. » : « Travailleuses, oui ; exploitées et violentées, non ! ».

Au Brésil, les féminicides sont également importants avec 4 femmes tuées chaque jour. Les manifestations de dimanche 8 mars à Rio de Janeiro, Sao Paulo, Brasilia, Belem… scandaient des mots d’ordre pour la fin des violences, l’égalité des droits et le départ de Bolsonaro.

En Argentine, le combat continue pour le droit à l’avortement légal, sûr et gratuit. Des dizaines de milliers de femmes se sont rassemblées devant le parlement à Buenos Aires pour le réclamer.

Dans l’état espagnol, 150 000 personnes ont manifesté (selon les autorités) dont 50 000 à Barcelone. À Madrid, Begoña Villacís – membre de l’organisation pro-monarchiste de droite Ciudadanos, a été chassée du cortège. Les manifestantes ont ainsi rappelé que le 8 mars n’est pas une journée de fête pour les femmes, mais au contraire une journée de lutte pour les conditions de vie des femmes travailleuses.

En France, plus de 200 actions, rassemblements et manifestations étaient prévus. Les organisations syndicales ont lancé depuis 2016 le mot d’ordre de « grève à partir de 15h40 » pour dénoncer les inégalités de salaires.

Cette année, la journée du 8 mars s’est ancrée dans la grève contre la réforme des retraites qui a mobilisé plusieurs millions de salariés.

À Paris, la manifestation du dimanche 8 mars a rassemblé 60 000 personnes selon les organisateurs.

Pour notre part, nous avons manifesté autour des revendications suivantes :

  • égalité salariale,
  • retrait de la réforme des retraites,
  • pour le droit à l’avortement libre et gratuit,
  • pour l’abolition de la prostitution,
  • pour la condamnation des violences faites aux femmes,
  • pour la condamnation de tous les pédocriminels.

Cette manifestation intergénérationnelle, parfois familiale, était impressionnante par la richesse des pancartes et de nombreux cortèges jeunes et combatifs.

Les mots d’ordre étaient principalement tournés contre les violences faites aux femmes : viols, mais aussi prostitution ou pornographie.

La majorité des pancartes condamnaient l’attribution du César du meilleur réalisateur à Roman Polanski (#violanski). On a pu voir également des cortèges dénonçant les inégalités salariales ainsi que différentes professions mobilisées contre la réforme des retraites : RATP, fonction publique, santé, éducation, commerce, avocates, danseuses, journalistes …

La journée du 8 mars 2020 est également caractérisé par une augmentation de la répression à plusieurs reprises.

Le vendredi 28 février au soir, deux militantes féministes ont été interpellées devant la salle Pleyel, où se déroulait la cérémonie des Cesar. Si l’actrice féministe Adèle Haenel a elle-même qualifié cette nomination de « honteuse », les manifestantes ont considéré ce prix comme la célébration du viol et du patriarcat (2).

Le samedi 7 mars, à Paris et à Toulouse, des cortèges pacifiques ont violemment été réprimés sur ordre des préfets de police. Des videos ont circulé montrant des manifestantes se faire jeter dans les escaliers de métro ou se faire insulter par les forces de l’ordre!

Le jour-même, dimanche 8 mars, à Nantes et à Bordeaux, les cortèges pacifiques, ont été dispersés à plusieurs reprises par des tirs de grenades lacrymogènes, alors qu’il y avait des enfants et des nourrissons !

Cette journée internationale a montré que les appels à la grève ont été très suivis. Le salariat féminisé a montré sa détermination dans les mouvements sociaux récents et la jeunesse choisit de lutter à ses côtés. Cela nous laisse présager le meilleur pour les mobilisations à venir.


1. En France, qui compte une population de plus de 66 millions d’habitants, cela correspondrait à plus de 12 millions de manifestants !

2. L’écrivaine Virginie Despentes a publié une tribune intitulée « On se lève et on se casse » : « Que ça soit à l’Assemblée nationale ou dans la culture, vous, les puissants, vous exigez le respect entier et constant. Ça vaut pour le viol, les exactions de votre police, les césars, votre réforme des retraites. En prime, il vous faut le silence de victimes »