Retraites complémentaires : un accord scélérat

« Ce n’est pas encore la retraite à 63 ans, mais on s’en approche à petits pas ». Le commentaire du journal bourgeois « les Échos » du 16 octobre est explicite, à propos de l’accord portant sur les retraites complémentaires ARCCO et AGIRC, finalisé par les organisations patronales, Medef, la CGPME, UPA et les « organisations syndicales » pro-patronales CFDT, CFE-CGC et CFTC, accord signé le 30 octobre.
Cet accord prévoit qu’à partir de 2019, un travailleur du privé – comme d’ailleurs certains travailleurs du public sous contrat de droit privé – ne pourrait pas bénéficier d’une retraite complémentaire pleine avant l’âge de 63 ans, bien que l’âge légal de départ soit de 62 ans. Cela ne surprendra personne, c’est, pour la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC, l’acceptation du principe d’un recul de l’âge de la retraite.
Cet accord instituerait un système de décote de 10 % par an pendant 3 ans, qui disparaîtrait donc à… 65 ans ! Cependant, le négociateur du Medef n’est pas entièrement satisfait : « la pénalité infligée ne portera que sur 2 % à 6 % de la retraite totale, un montant insuffisant pour dissuader un salarié résolu à partir tôt. » (ibidem). Pour ceux qui partiraient 2 à 3 ans après l’âge du taux plein, il y aurait une surcote de 15 à 25 %. C’est une « incitation » à mourir au travail.
C’est une mesure qui frappe encore plus les femmes qui ont connu des interruptions de carrière professionnelle pour maternité. Cela s’appelle une régression sociale.
Au-delà, l’accord prolongerait de trois ans le blocage du montant des retraites complémentaires, il organiserait la baisse du nombre de points acquis pour les futurs retraités, et donc à terme une baisse des pensions.
Plus fort encore pour le Medef : avec la complicité du gouvernement Hollande-Valls, l’augmentation de la part « patronale » des cotisations ARRCO-AGIRC serait compensée par une baisse de la cotisation « accidents du travail-maladies professionnelles » auprès de la sécurité sociale : coût de l’opération pour les capitalistes, zéro euro !
Cerise sur le gâteau, l’accord poserait ainsi les bases de la fusion entre ARRCO et AGIRC, organisant une solidarité des ouvriers et employés envers les cadres ! C’est bien un accord au détriment des travailleurs, de leur retraite complémentaire et de leur sécurité sociale.
Il n’aura pas fallu longtemps pour que le Sénat s’empare de cet accord qui organise le recul de l’âge de départ effectif à la retraite et ouvre la boîte de Pandore du recul de l’âge légal. Il vient d’adopter un amendement dans ce sens, portant ce dernier à 63 ans !
Les représentants de la CGT et de la CGT-FO ont quitté la table des négociations, dénonçant la dégradation des pensions pour les retraités actuels et futurs et condamnant le recul du taux plein à 63 ans.
Cependant, les dirigeants de la CGT et de la CGT-FO ont accepté de participer jusqu’à la dernière limite à cette négociation « à froid » sans qu’elle soit le fruit d’une mobilisation unitaire et victorieuse. Pourtant on savait d’emblée ce qui se préparait c’est-à-dire, encore une fois, une régression sociale, sur la base des « revendications » patronales. Voilà où mène le « dialogue social », la collaboration de classes.
Maintenant, ce que les travailleurs attendent de leurs organisations syndicales, c’est qu’elles appellent à la mobilisation dans l’unité pour l’annulation ce cet accord inique, scélérat, pour un retour à la retraite à 60 ans maximum à taux plein après 37,5 ans de cotisation maximum.