Un vote sanction massif contre le chavisme – Déclaration du Parti Socialisme et Libération ( Section Vénézuélienne de l’UIT)

N. Maduro Président chaviste du Vénézuela N. Maduro Président chaviste du Vénézuela

Le 11 décembre 2015

Le 6 décembre dernier, le gouvernement de Nicolás Maduro et le PSUV (Parti socialiste unifié du Venezuela) ont subi une lourde défaite politique, en faveur de l’opposition pro-impérialiste regroupée au sein de la MUD (Table de l’unité Démocratique).

La MUD a obtenu la majorité qualifiée des deux tiers à l’Assemblée, soit un total de 112 députés, tandis que le PSUV a eu 55 sièges. Le chavisme a ainsi perdu la majorité qu’elle détenait depuis 16 ans à l’Assemblée Nationale.

Il s’agit d’une défaite cinglante. La MUD a obtenu 7 707 422 voix, ce qui représente 56,2 %, tandis que le chavisme a eu 5 599 025 voix, soit 40,8 %.

Le vote massif pour la MUD reflète un vote sanction clair de la part de la majorité du peuple et des travailleurs contre la détérioration croissante de leur niveau de vie. Il s’agit d’un vote de rejet contre la forte inflation, contre les files d’attente honteuses, contre la pénurie des produits essentiels, contre les bas salaires, contre l’insécurité, contre les licenciements, et contre le très mauvais état des services publics.

Il s’agit d’un vote sanction contre le gouvernement. Ce dernier a criminalisé les protestations, a poursuivi ceux qui luttent, a licencié des milliers de travailleurs des organismes publics, a remis en cause les contrats collectifs et a violé systématiquement l’autonomie des organisations populaires et syndicales.

Ce résultat électoral ne correspond absolument pas à un virage à droite. Le résultat électoral obtenu par la MUD ne traduit pas une grande confiance dans ses dirigeants ou un soutien de ses propositions politiques. Il s’agit surtout d’un vote clair contre le gouvernement et contre le désastre dans lequel est plongé la vie quotidienne du peuple travailleur. Ce vote n’est pas un chèque en blanc. Nombreux ont été ceux qui ont voté pour la MUD en « se bouchant le nez ».

Ce vote n’exprime pas non plus l’échec du socialisme comme essaient de le faire croire certains secteurs patronaux et pro-impérialistes. En réalité, au Venezuela, il n’y a aucune forme de socialisme. Ce qui a échoué, c’est un modèle politique, économique et social qui a permis aux banquiers, à des transnationales dans les secteurs des télécommunications et du pétrole, à la bourgeoisie bolivarienne et à des fonctionnaires corrompus de s’enrichir en profitant de la détérioration du niveau de vie de la population. Tout ceci en profitant de la rente pétrolière, en trompant le peuple et en cachant leurs affaires derrière un faux discours socialiste. Ce qui est responsable du renforcement de ces variantes de centre-droit, c’est le chavisme et l’échec de son projet politique.

Au cours de ces dernières années, le peuple travailleur vénézuélien a vu son niveau de vie s’effondrer. Les Vénézuéliens et les Vénézuéliennes travaillent énormément. Leurs salaires sont mangés par l’inflation. La pénurie des longues et épuisantes files d’attente pour obtenir les produits de première nécessité ont eu raison de la patience du peuple.

Le drame du très mauvais état des services publics, la catastrophe des transports, le manque d’eau et d’électricité ont fait que la vie quotidienne de millions de personnes est devenue insupportable. Toutes ces vicissitudes expliquent le vote sanction sans appel du peuple travailleur contre le gouvernement de Nicolás Maduro et du PSUV.

Il est évident que la majorité n’a pas cru à la fable de la « guerre économique », derrière laquelle le gouvernement a essayé de cacher ses responsabilités dans la sévère crise économique que connaît le pays. Le peuple n’a pas adhéré aux slogans électoraux dans lesquels le président défunt était utilisé comme drapeau.

Les « Nous sommes les candidats de Chávez » ne sont pas arrivés à dépasser le mécontentement qui s’est accumulé au sein du peuple vénézuélien. Les résultats électoraux sont venus apporter un démenti formel aux propos d’un journaliste lié au gouvernement et qui a assuré avant les élections que le peuple vénézuélien était « culturellement chaviste ».

Les résultats du 6 décembre sont une nouvelle phase de la crise politique, économique et sociale du pays. Désormais, il y a deux secteurs patronaux qui s’affrontent : un qui contrôle le pouvoir exécutif et autres institutions ; un second qui contrôle la majorité du parlement. Nous comprenons le rejet du gouvernement par le peuple, mais en aucun cas nous ne pouvons placer notre confiance dans la nouvelle Assemblée Nationale ni dans les députés de la MUD.

Le Parti Socialisme et Liberté défend l’idée selon laquelle, nous, les travailleurs et le peuple, devons continuer à avoir confiance dans nos propres forces, dans notre mobilisation indépendante et autonome, tant vis-à-vis du gouvernement que de la MUD. Cela est fondamental pour impulser par le bas, notre propre programme politique et nos revendications à l’égard de la nouvelle Assemblée.

En ce sens, le PSL exige que soit approuvée à l’Assemblée Nationale, une loi d’augmentation générale des salaires. Nous exigeons ainsi que le salaire minimum soit calculé en fonction du panier de base et qu’il augmente tous les trois mois en fonction de l’inflation.

Nous exigeons aussi une loi de réembauche de tous les travailleurs injustement licenciés, qui prévoit la réintégration de nos camarades Bladimir Carvajal et Orlando Chirino, ainsi que le paiement des salaires non versés en raison de ces licenciements.

Nous exigeons une loi d’amnistie pour tous les militants syndicaux, associatifs, étudiants, indigènes ainsi que pour les dirigeants politiques détenus ou pour ceux soumis à des mesures de privation des libertés. Parmi eux, il y a Rodney Alvarez, travailleur de l’entreprise minière Ferrominera détenu depuis 5 ans pour un délit qu’il n’a pas commis.

Nous exigeons l’amnistie des indiens pemones actuellement poursuivis dans le cadre d’actions judiciaires. Nous exigeons une enquête parlementaire sur l’assassinat de Sabino Romero ainsi que sur les massacres de La Encrucijada, de celui des travailleurs de Mistubishi en janvier 2009 dans le cadre d’une grève (…). Nous exigeons que soient revues les lois qui restreignent le droit de manifester et de faire grève. Nous exigeons la rupture des contrats des entreprises mixtes dans le secteur pétrolier, afin que PDVSA soit 100 % publique et soit gérée par ses travailleurs, ses techniciens et ses professionnels.

Le président N. Maduro lui-même et l’ex-député du PSUV Elvis Amoros ont annoncé des mesures économiques et de nouvelle mesures d’austérité. Elles aggraveront la pénurie qui frappe le peuple travailleur. Il est possible qu’ils mettent en place l’augmentation de l’essence et prennent d’autres mesures anti-ouvrières. Sur ces points, les députés de la MUD sont totalement d’accord avec le gouvernement.

La nouvelle situation exige de renforcer l’organisation autonome du peuple et des travailleurs et exige la mobilisation pour affronter le gouvernement et l’Assemblée Nationale pour résister aux plans d’ajustement structurels et aux attaques contre les travailleurs que ces deux courants essaieront d’impulser.