Manifeste pour la IVe internationale, Il est encore temps !
Aux travailleurs, aux travailleuses, aux militants et aux jeunes.
« Est-il possible de modifier par des réformes les bases de l’impérialisme ? Faut-il aller de l’avant pour accentuer et approfondir les antagonismes qu’il engendre, ou on arrière pour les atténuer ? Telles sont les questions fondamentales de la critique de l’impérialisme. Les particularités politiques de l’impérialisme étant la réaction sur toute la ligne et le renforcement de l’oppression nationale, conséquence du joug de l’oligarchie financière et de l’élimination de la libre concurrence, l’impérialisme voit se dresser contre lui, dès le début du XXe siècle, une opposition démocratique petite-bourgeoise à peu près dans tous les pays impérialistes. La rupture de Kautsky et du vaste courant international kautskiste avec le marxisme consiste précisément dans le fait que Kautsky, loin d’avoir voulu et su prendre le contre-pied de cette opposition petite-bourgeoise, réformiste, réactionnaire, quant au fond, sur le plan économique, a au contraire pratiquement fusionné avec elle. » (V. I. Lénine, 1916, L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, IX. La critique de l’impérialisme).
Lénine a défini l’époque de l’impérialisme comme étant celle de la réaction sur toute la ligne et cette définition n’a pas pris une ride. Nous en voyons tous les jours de nouveaux développements, car tout retard dans la révolution socialiste mondiale a pour corollaire de voir croître le risque d’un retour à la barbarie, c’est-à-dire le recul de toute civilisation.
Ainsi, les capitalistes s’attaquent de plus en plus ouvertement aux acquis de la révolution démocratique bourgeoisie qu’ils ont pourtant réalisée il y a trois siècles dans un mouvement commencé dans les Provinces unies1. Ils s’en prennent à ce qui a été le préalable de cette révolution : le développement de la liberté de conscience, le rationalisme et la méthode scientifique en elle-même. Par tous les moyens, les capitalistes font la promotion de l’obscurantisme et de la féodalité.
Socialisme ou barbarie ?
C’est pourquoi l’alternative « socialisme ou barbarie2 » est plus que saisissable par le plus grand nombre alors que devant nous, à un rythme qui va en accélérant, s’additionnent les catastrophes.
L’accès à l’eau potable est un luxe pour une part grandissante de l’humanité. Alors que la production agricole dépasse le double des besoins, la faim demeure un fléau pour des centaines de millions. Alors que les progrès de la médecine permettraient d’éradiquer nombre de maux, on voit des millions mourir chaque année du paludisme ; on voit les risques de pandémie augmenter à l’instar de la Covid-19, etc.
Sur cette planète l’ensemble des espèces vivantes sont interdépendantes. La disparition d’une espèce en menace d’autres. À partir d’un certain point, on peut assister à une sorte de réaction en chaîne. Or, le rythme de la disparition des espèces accélère maintenant au point où les grands équilibres du vivant sont menacés.
C’est un des aspects essentiels de la barbarie capitaliste que de menacer l’espèce humaine elle-même en détruisant la nature ; en poussant l’humanité à détruire son environnement pour survivre ce qui la prive en définitive de moyens de subsistances.
L’urgence climatique, c’est l’urgence pour inverser le cours des événements, pour que l’humanité coopère à trouver la solution et cela n’est possible que si tout le monde est mis à contribution : c’est cela le développement des forces productives.
Or la dynamique du capitalisme s’oppose à cette urgence, sa logique est celle de la guerre de tous contre tous pour des profits maximum pour quelques-uns. « Le capitalisme porte la guerre comme la nuée porte l’orage » (Jaurès). Le capitalisme, c’est la destruction des forces productives à commencer par la principale, l’être humain.
De ce point de vue, les « écologistes » se divisent principalement en trois courants.
Tout d’abord ceux qui considèrent, en bons chrétiens, que « l’homme est mauvais » et qu’en conséquence il est de trop sur terre. Comme tous les régimes réactionnaires, ils prônent le retour à la terre, c’est-à-dire un retour à une société agraire avec un coût humain dont ils se gardent bien de parler. Ceux-là trouveront toujours des soutiens parmi les capitalistes.
Ensuite, ceux qui prétendent trouver dans le cadre du capitalisme lui-même la solution aux maux dont le capitalisme est seul responsable ; les tenants d’un soi-disant « capitalisme vert ». Ce sont des charlatans !
Leur combat consiste surtout à remettre toujours plus de fonds publics entre les mains des capitalistes au nom de la « transition énergétique » pour que les mêmes continuent à faire des profits. Le « capitalisme vert », « éthique », « responsable », c’est une utopie criminelle qui vise à détourner les travailleurs de leur mission historique : mettre fin à l’exploitation de l’Homme par l’Homme, par la socialisation des moyens de production et d’échange.
Enfin, ceux qui ont compris que pour inverser le cours des évènements la mobilisation du plus grand nombre est nécessaire pour en finir avec LE problème : le capitalisme. À ceux-là les portes de l’Internationale que nous voulons contribuer à reconstruire doivent être grandes ouvertes.
De nombreux gouvernements bourgeois confrontés à la mobilisation populaire, à commencer pas celui des USA, des autres puissances impérialistes, de la Russie ou de la Chine, cherchent des boucs émissaires en dehors de leurs frontières. Ce qui fait que les bruits de bottes, le bruit des canons, des missiles, des bombes sont de plus en plus assourdissants.
Car depuis plusieurs années, il est évident que les capitalistes ne peuvent plus gouverner comme avant. Les travailleurs, les travailleuses, les jeunes n’acceptent plus d’être gouvernés comme avant.
À partir de 2010, la chute de Ben-Ali, Moubarak et Kadhafi a provoqué une onde de choc à l’échelle du monde que les puissances impérialistes et leurs valets tentent depuis de juguler, de dévoyer avec les plus grandes difficultés.
L’absence d’une direction révolutionnaire s’est faite cruellement sentir. C’est cette absence, ce vide, qui a donné lieu à des combinaisons dans lesquelles des islamistes de toutes obédiences ont fait des offres de services pour rétablir l’ordre impérialiste à leur façon.
La mobilisation qui s’est développée à ce moment-là en Algérie a connu des flux et des reflux pendant près de 10 ans. Elle a cherché patiemment sa voie, forte d’une puissante expérience historique, pour ressurgir avec le Hirak en 2019 exigeant la départ de Bouteflika et du régime dans son ensemble.
Dans ce contexte, il faut souligner la permanence du combat du peuple Palestinien contre l’État sioniste, citadelle de l’impérialisme dans la région qui maintien « l’ordre » en relation avec l’Arabie « saoudite » et le régime d’Erdoğan en Turquie.
Malgré une direction prête à tous les compromis et à toutes les compromissions avec les sionistes, le peuple palestinien est toujours debout pour : une Palestine, une, laïque, démocratique et non raciste où pourraient vivre pacifiquement Arabes et Juifs, c’est-à-dire la destruction de l’État d’Israël.
Le « printemps arabe » a donné une première et puissante impulsion à des mobilisations de plus en plus nombreuses, de plus en plus fréquentes, de plus en plus déterminées.
La première des puissances impérialistes, les USA, est confronté à une crise politique sans précédent depuis la guerre civile (dite de Guerre de sécession). Elle est loin d’être la seule comme le démontre aussi la profonde crise politique, institutionnelle et sociale de l’impérialisme français, les suites du Brexit au Royaume-uni, etc.
Chaque soubresaut de la crise capitaliste aboutit à l’explosion de la dette publique et cette explosion est instrumentalisée par les capitalistes pour imposer leurs dictats sous la forme de la « politique d’ajustements structurels ».
Qu’on ne se trompe pas. La nécessité d’annuler la dette – qui est partout une arme aux mains de capitalistes – reste entière. Cette exigence devrait être au premier plan des préoccupations de toute organisation révolutionnaire.
Ainsi nous sommes dans une situation prérévolutionnaire. Les mobilisations ouvrières et populaires se développent sur quatre axes :
Le combat pour le développement des libertés démocratiques,
L’exigence de meilleures conditions de vie et de travail avec la dignité et l’égalité comme puissants moteurs,
Le combat pour la fin de l’oppression que fait peser l’impérialisme sur chaque parcelle de la planète avec le rejet du colonialisme,
Le rejet de plus en plus conscient du capitalisme comme mode de production vecteur de guerres et de dévastations sans nombres. Le refus de la barbarie qui s’étend de jour en jour et menace les bases même de la survie de l’humanité.
Les capitalistes s’en prennent au droit d’association, de rassemblement, de manifestation sous des prétextes sécuritaires ou même « sanitaires ». Le masque de la « lutte contre le terrorisme » sert dans la réalité à mettre en place « légalement » une dictature insidieuse, constitutionnelle, un état d’exception permanent.
Les capitalistes et les gouvernements bourgeois criminalisent la grève et l’occupation d’usine, entravent tous les jours un peu plus toute action syndicale ou politique qui viserait à renforcer l’indépendance de classe.
À défaut de pouvoir les détruire, l’intégration des syndicats aux entreprises et dans les rouages de l’appareil d’État tend à les paralyser et à en faire des instruments corrompus de l’accompagnement des décisions patronales. Aussi le combat pour l’indépendance de classe est un axe primordial de notre politique.
Dans cette situation, la défense et le renforcement des libertés démocratiques sera déterminant.
– Les femmes sont particulièrement visées par l’offensive réactionnaire qui veut les renvoyer au foyer et les cantonner au rôle de génitrices. Rien ne saurait justifier que des militants ou organisations qui se réclament du mouvement ouvrier ne défendent pas le droit des femmes, au premier rang desquelles les travailleuses : à travail égal, salaire égal, c’est la première revendication.
Et surtout, les femmes doivent être libres de disposer de leur corps. Le libre accès à la contraception et à l’avortement, leur gratuité sont des revendications centrales.
Là où des avancées importantes ont été obtenues, les forces réactionnaires tentent d’imposer un retour en arrière. Ces forces qui souvent soutiennent des politiques eugénistes qui visent à éradiquer la pauvreté en éradiquant les pauvres ont la prétention de retirer ces libertés aux femmes.
Ainsi, par exemple, depuis des décennies, l’impérialisme US couvre, finance ou promeut par l’USAID des programmes de stérilisation forcée et d’avortement contraint menés par des états qui acceptent d’en prendre la responsabilité. Souvent aussi cette politique passe par des fondations privées. Cela doit cesser !
Le contrôle des naissances doit être laissé aux couples, essentiellement aux femmes. Il n’est pas du rôle de l’État de promouvoir la natalité ni de la restreindre : c’est aussi une liberté démocratique !
Les mariages forcés, les mutilations dont des femmes sont victimes doivent être combattus comme des manifestations d’un ordre réactionnaire et machiste qui ne sauraient être justifiées d’aucune façon.
La prostitution ne peut pas être considérée comme une liberté. Elle est un des pires aspects de l’exploitation, voire de l’esclavage et de la traite.
La laïcité de l’État, c’est-à-dire sa séparation de toute institution religieuse, vise à la liberté de conscience des individus. C’est-à-dire leur liberté de croire, de ne pas croire, en un ou des dieux ou de nier l’existence de tout dieu et de le manifester librement.
La laïcité de l’État implique que les lois civiles s’imposent à tous et ne sont subordonnées à aucune supposée « loi divine ». Le contraire de la laïcité est le cléricalisme. Le combat pour la laïcité de l’État et de l’école sont d’autant plus d’actualité que la bourgeoisie s’y attaquent avec détermination, malgré les scandales qui impliquent régulièrement des autorités religieuses qui se considèrent au-dessus des lois.
De même, la question du régime ne peut pas être neutre pour les marxistes révolutionnaires. Elle conditionne en grande partie nos capacités à développer notre politique et à créer les conditions pour la prise du pouvoir par le prolétariat. Le développement des libertés démocratiques et l’accroissement des conquêtes sociales ne s’opposent pas, mais au contraire se combinent.
Le cadre de la république parlementaire offre les conditions pour que notre combat puisse se développer. Mais ne nous leurrons pas, à l’époque de l’impérialisme la bourgeoisie ne peut plus s’offrir le luxe du maintien des libertés démocratiques et cherche à remettre en cause cette forme de gouvernement.
Le combat contre les velléités de recours de la bourgeoisie au fascisme, ou à des juntes militaires ; le combat contre son appui à des gouvernements bonapartistes ou « présidentiels » sont des combats justes et ô combien nécessaires. Car de l’issue de ces combats dépend la survie du prolétariat comme classe indépendante. Le fascisme, c’est une menace physique pour les travailleurs et les jeunes.
Cependant, il est toujours pénible d’avoir à répéter que la monarchie, fût-elle constitutionnelle, fût-elle « respectueuse » des libertés démocratiques au moins en apparence, à l’instar du Royaume-uni par exemple, doit dans tous les cas être une cible de notre combat révolutionnaire.
Renoncer à abattre la monarchie absolue (Arabie « Saoudite », etc.) ou « constitutionnelle » (Thaïlande, Royaume-uni, Belgique, Pays-Bas, etc.) c’est capituler. La monarchie espagnole des Bourbons restaurée par Franco tient à ce titre une place particulière parmi les régimes à renverser.
Toutes les séquelles des institutions féodales doivent être vaincues comme le système de castes et les « crimes d’honneur » qui perdurent dans nombre de pays et dont les femmes sont les premières victimes.
Aussi, quelle crédibilité peut-on accorder au programme révolutionnaire qui vise à l’établissement d’une république universelle des conseils ouvriers si ceux qui prétendent le défendre s’accommodent de la monarchie ?
Lénine encore nous a démontré que le droit des nations à disposer d’elles-mêmes devient, dans le cadre de l’impérialisme, un droit très théorique dont l’exercice est, dans la pratique, lié aux intérêts des puissances impérialistes.
Les cas récents de la Catalogne et de la Kanaky et à plus forte raison d’Ukraine en sont une énième illustration : sans le renversement du cadre d’oppression capitaliste, l’indépendance complète est illusoire. À ce titre le cas des Ouïghours en Chine est bien l’arbre qui cache la forêt.
C’est pourquoi nous devons mettre en garde les peuples opprimés contre l’illusion distillée par les nationalistes petit-bourgeois, a fortiori les nationalistes bourgeois, selon laquelle l’indépendance complète resterait possible dans le cadre du capitalisme à l’époque de l’impérialisme.
Le combat pour l’indépendance passe par la lutte pour le renversement du capitalisme, sinon il se perd, s’enlise, dans les méandres de l’autonomie dans sa version réformiste, pro-capitaliste, de « l’autonomie culturelle ».
Il est révélateur comme l’exigence de l’assemblée constituante souveraine a été au cœur des mobilisations dans les pays semi-coloniaux dans lesquels les vastes mobilisations ont abouti au renversement d’un gouvernement autoritaire.
Cette exigence est porteuse de la volonté de prendre son destin en main, de ne pas se laisser imposer une solution dictée par les « institutions internationales » au service des capitalistes.
Les mobilisations qui sont loin d’avoir dit leur dernier mot au Chili ou en Algérie se sont développées sur la base du rejet du gouvernement et du régime en place et sur l’exigence de la constituante souveraine.
Alors que les « commentateurs » se lamentent sur la difficulté d’organiser une élection présidentielle en Libye, il faut au moins se poser une question : qui a décidé qu’il faut un président en Libye ? Les capitalistes sont en train de dépecer la Libye en jouant sur de vieilles divisions féodales.
Or les Libyens ont un besoin vital de décider seuls de leur avenir. L’élection d’une assemblée constituante souveraine devrait leur permettre d’avancer dans cette voie.
Depuis deux décennies, y compris au cœur de la citadelle de l’impérialisme, les mobilisations se développent : grèves, manifestations, émeutes…
La gigantesque grève qui s’est produite en Inde fin 2019 et début 2020 en est la démonstration éclatante dans un pays où, pourtant, subsiste un important secteur stalinien maoïste dont le rôle n’a pas changé. Nous avons vu en Inde dans la pratique l’union des ouvriers et des paysans et Modi a dû reculer !
Aux États-Unis, la révolte Black Lives Matter, la multiplication des grèves ouvrières, la constitution de nouveaux syndicats, montrent un formidable renouveau de la conscience de classe et du socialisme au sein même du premier impérialisme mondial.
La révolution en Tunisie et en Égypte ont mis en mouvement les masses arabes dans leur ensemble et donné une nouvelle impulsion à une lame de fond qui est devenue planétaire.
Dans le monde entier désormais, les revendications démocratiques se mêlent à des revendications sociales qui nécessite une réponse collective qui remette en cause le cadre général et global de l’exploitation et de l’oppression. La lutte des classes tend partout à déborder les vieux appareils qui pourtant se maintiennent.
Ces vieux appareils sont les directions des partis qui se réclament ou se sont jadis réclamées du mouvement ouvrier, sociaux-démocrates et staliniens ainsi que les directions syndicales qui leur sont liées.
Car les capitalistes profitent à fond de la pandémie de Covid-19 pour mettre en œuvre une gigantesque restructuration de l’ensemble des secteurs de production. Ils escomptent que les vieux appareils parviendront à contenir les mobilisations ouvrières et jeunes dans chaque pays en relation avec leur bourgeoisie nationale.
Des masses phénoménales de capitaux mis à disposition des capitalistes par les banques centrales depuis 15 ans. Elles sont utilisées pour organiser la pénurie et la spéculation et pour imposer à l’ensemble des états les « ajustements structurels » exigés par les capitalistes et alimenter l’économie d’armement.
La concentration du capital va en s’accélérant. Tous les secteurs de l’économie sont visés par le renforcement des monopoles, les paysans, petits commerçants et artisans sont, eux aussi, de plus en plus nombreux aux côtés des prolétaires à être menacés dans leur existence.
Que prépare cette fuite en avant dans un contexte de tensions inter-impérialistes sans précédent depuis la Seconde guerre mondiale ? Nous le savons tous : c’est le risque d’écrasement du prolétariat ou tout au moins sa « défaite à froid », sans combat, qui ouvrirait une nouvelle phase d’affrontement généralisé pour imposer une nouvelle division internationale du travail.
Trente-trois ans après la chute du Mur de Berlin
La révolution d’octobre avait posé les bases du premier État ouvrier après la tentative de la Commune de Paris. Pour les Bolcheviks, la révolution dans l’empire des tsars devait être le premier acte de la révolution mondiale. En ce sens, l’URSS était un acquis du mouvement ouvrier révolutionnaire.
Le reflux de la révolution mondiale a eu pour conséquence l’isolement de l’URSS et le renforcement de la bureaucratie qui a porté Staline au pouvoir, sans remettre en causes les nouveaux rapports de production à ce stade. C’est l’équivalent de thermidor par rapport à la révolution bourgeoise de 1789.
Cependant, Trotski avait caractérisé la bureaucratie stalinienne comme une couche petite-bourgeoise instable qui vivait en parasite sur l’État ouvrier bureaucratiquement dégénéré.
En tout état de cause, la nature nationaliste et contre-révolutionnaire de la bureaucratie stalinienne ne faisait pas de doute pour Trotski. La transformation de l’Internationale communiste en un réseau de relais diplomatiques de la bureaucratie avant sa dissolution pure et simple par Staline à la demande de Roosevelt et Churchill en est l’illustration.
Sur cette base, Trotski avait établi un pronostic selon lequel, soit la bureaucratie serait renversée au terme d’une révolution politique menée par les éléments prolétariens de l’URSS, soit elle s’engagerait dans la restauration du capitalisme.
En 1989, la Chute du Mur de Berlin a scellé la crise terminale de la bureaucratie stalinienne qui régnait sur l’URSS, les pays d’Europe centrale et orientale, la Chine, la Corée du Nord, le Viêtnam et Cuba. Des millions se sont levés pour l’abattre et l’issue de cette mobilisation n’était pas donnée à l’avance.
La révolution politique s’est bien développée à partir des mobilisations ouvrières à Berlin en 1953, en Hongrie avec la renaissance des conseils ouvriers en 1956, en Tchécoslovaquie, en Pologne dès 1970 jusque dans les années 1980 et en Allemagne de l’Est en 1989, etc.
La division de l’Allemagne par les impérialistes alliés de la bureaucratie à la fin de la seconde guerre mondiale était d’abord et avant tout une tentative de diviser durablement le prolétariat allemand. Le mur de Berlin était la consécration de cette politique.
Dans les années 1960, la construction d’un mur coupant physiquement l’Allemagne en deux était une tentative de la bureaucratie stalinienne de juguler la montée de la révolution politique.
En 1989, la révolution politique s’était développée. Elle pouvait se solder par la défaite de la bureaucratie stalinienne et la réorganisation de toute la société sur des bases authentiquement soviétiques. En Allemagne de l’Est elle devait forcément avoir comme corollaire l’unification du pays ce qui signifiaient l’ouverture d’une révolution sociale et politique en Allemagne de l’Ouest.
Or l’impérialisme est parvenu à restaurer le capitalisme là où il avait été exproprié. La raison première, nous la connaissons tous. C’est l’absence d’un parti révolutionnaire, c’est l’absence d’une internationale ouvrière déterminée à en finir avec la propriété privée des moyens de production et d’échange (la révolution sociale) ; déterminée à avancer vers un socialisme véritable, débarrassé de la caste bureaucratique (la révolution politique).
Face à l’absence d’un parti pour aider cette mobilisation aux moments déterminants, les secteurs restaurationistes de la vieille bureaucratie se sont transformés en une nouvelle bourgeoisie. Insistons, car il ne faut pas se bercer d’illusion à propos de Cuba ou de la Corée du Nord – ou a fortiori de la Chine : depuis deux décennies au moins, des contre-réformes structurelles y ont été mises en œuvre qui amènent la progression du secteur privé et de l’investissement étranger. Quoi qu’en disent les dirigeants de ces pays, la restauration est un fait ou est en marche.
La forme et le rythme de la restauration ont partout été déterminés par la « négociation » de la bureaucratie avec l’impérialisme quant à la place de cette nouvelle bourgeoisie dans la division internationale du travail. Dans les cas de l’URSS ou la RDA, par exemple, de vastes pans des capacités de production ont été démantelés purement et simplement.
À Cuba précisément, les anciens propriétaires font pression via l’impérialisme US pour être rétablis dans leur propriété antérieure. C’est en réalité tout l’enjeu du combat des « progressistes » concernant l’île de la Caraïbe, bien que certains soient sincèrement persuadés de la bureaucratie castriste défend « le socialisme à la cubaine ».
En Chine, l’impérialisme a fait le choix d’appuyer le secteur de la bureaucratie restaurationniste représenté par Deng Xiaoping. Celui-ci étant jugé comme le plus capable de maintenir l’ordre et d’empêcher l’éclatement du pays. La Chine étant vue comme un gigantesque marché par les capitalistes et comme une source intarissable de capitaux pour combler le déficit chronique de la principale puissance, les USA.
Il ne faut pas se leurrer, l’opposition ne se situe pas entre « progressistes » et réactionnaires, mais entre révolutionnaires et contre-révolutionnaires. Étant bien entendu que nombre de ceux qui se qualifient de « progressistes » sont déterminés à maintenir la mode de production capitaliste et se révèlent être de ce fait de simples réformistes (dans le sens classique du terme), des contre-révolutionnaires.
Cet événement historique de 1989 a ouvert une longue période de décomposition-recomposition de l’ensemble des forces politiques, celle de la bourgeoisie, mais aussi celles qui étaient censées représenter le prolétariat.
Or les forces de la bourgeoisie sont en avance dans leur processus de recomposition alors que celles du prolétariat sont encore largement entravées par leur décomposition. Pourquoi ?
Pourquoi l’alternative posée par L. Trotski, révolution politique ou restauration capitaliste s’est-elle soldée par la restauration et pourquoi le prolétariat est-il en retard dans sa recomposition ? De la réponse à ces questions dépend notre capacité à résoudre la crise de l’humanité qui se résume à la crise de sa direction révolutionnaire3.
Les deux éléments sont indissolublement liés. Ils questionnent l’ensemble des partis, courants se réclamant à un degré ou à un autre du prolétariat. Ils questionnent évidemment au premier chef ceux de ces partis ou courants qui ont tourné le dos au prolétariat.
La bourgeoisie a profité de la désorientation des larges masses pour avancer rapidement et brutalement, malgré une importante résistance des travailleurs et de la jeunesse ; résistance qui ne pouvait être que « spontanée » en l’absence d’un parti révolutionnaire pour aider à l’organiser.
Malgré cette résistance, de nombreux secteurs ont renoncé à combattre pour le socialisme arguant frauduleusement que le mot fait peur. Tout comme ils n’ont pas été capables de se préparer à l’effondrement du stalinisme avant 1989, ils n’ont pas voulu postuler la direction du mouvement ouvrier.
Pire, certains secteurs ont théorisé une disparition inexorable de la classe ouvrière vouée à être remplacée par une autre forme de prolétariat liée au « secteur tertiaire » rebaptisé « classe moyenne ». C’est une conception très centrée sur la désindustrialisation de l’Europe alors que les bataillons de la classe se sont considérablement renforcés en Inde ou en Chine.
Pourtant, en Europe même, si les très grandes concentrations ouvrières ont tendance à disparaître, les ouvriers représentent encore des dizaines de millions de travailleurs et des dizaines d’autres, appartenant au secteur tertiaire sont des prolétaires.
Elle prouve l’incapacité de ces secteurs politiques à se saisir des phénomènes économiques, politiques et sociaux à l’échelle du monde. Outre qu’elle révèle une confusion sur le rôle de la classe ouvrière qui est le secteur le plus déterminé du prolétariat. Pourtant, un livreur « indépendant » aujourd’hui n’est pas un ouvrier, il n’en est pas moins un prolétaire.
Ce tournant initié par la social-démocratie tournant le dos au prolétariat revient à considérer à l’instar du gauchisme décomposé d’après 1968 que « la classe ouvrière s’est embourgeoisée ». C’est aussi ce que sous-entendent les staliniens quand ils tentent de justifier leur politique de collaboration de classes en prétendant que « les travailleurs ne veulent pas se battre ».
Le programme social a été remplacé par un programme sociétal. Les ouvriers et les employés ont été délaissés au « profit » des « minorités »… pas forcément ouvrières du point de vue de leur place dans les rapports sociaux de production.
Marx, Engels, Lénine et Trotski sont délaissés au profit de Foucault, Holloway, Chomsky, Butler et compagnie qui rejoignent la bourgeoisie dans sa « négation » de la lutte des classes. Si les forces en présence ne sont pas le prolétariat et la bourgeoisie, alors quelles sont-elles ? Des communautés ? Des minorités ? C’est oublier en passant que les femmes ne sont pas une minorité.
À quoi tout cela aboutit-il ? À diviser, morceler, atomiser la seule force sociale, la seule classe, qui pourrait remettre en cause le mode de production capitaliste, le prolétariat.
En effet, le capitalisme serait-il acceptable à condition de développer la démocratie jusqu’au bout et la liberté absolue des individus ? Ce « programme » rejoint celui des libertariens, les « anarchistes de droite ». Un programme qui réclame une totale liberté dans le domaine économique et dans celui des mœurs avec un État strictement ramené à ses fonctions régaliennes (armée, police, justice, fiscalité).
Bien entendu, dans ce contexte, pourquoi combattre alors les bureaucraties syndicales et politiques qui cherchent à paralyser le mouvement ouvrier ou à le dévoyer ?
Pourquoi alors combattre le cléricalisme et l’obscurantisme religieux ? Puisqu’il faut admettre tous les préjugés comme autant de manifestations « culturelles », donc également respectables à ce titre…
Comment dès lors prétendre combattre l’extrême-droite quand on considère le capitalisme comme un horizon indépassable ? Sur le plan de la morale ? Au prétexte que les « gilets jaunes » ne leur semblaient pas suffisamment « politiquement corrects » certains leur ont d’abord tourné le dos prenant le risque de les jeter dans les bras d’authentiques fascistes.
Où sont les leçons de Trotski sur la bureaucratie, la social-démocratie, le stalinisme, l’anarchisme, le front populaire et le fascisme ? Il est urgent de revenir aux fondamentaux et aux sources du marxisme !
Quel bilan ?
Ce désarmement politique et organisationnel peut encore être stoppé. Il peut l’être en s’appuyant sur les mobilisations ouvrières et populaires qui se développent dans le monde entier. Elles ne se développent pas partout en même temps ni au même rythme, mais elles se développent, avec ses avancées et ses reculs. Elles approchent du moment où les limites des mobilisations spontanées seront atteintes et où toute l’importance du parti révolutionnaire se fera sentir, mais elles se développent indéniablement.
Oui, Marx a été perspicace quand il a polémiqué avec Proudhon : l’anarchisme est bien une philosophie de boutiquiers nostalgiques de la période lointaine où le capitalisme se fondait sur des entrepreneurs indépendants et libres.
Cette époque est révolue depuis longtemps et l’anarchisme sert désormais de justification morale au capitalisme qui cherche à atomiser la classe ouvrière à la transformer en une horde d’autoentrepreneurs corvéable à merci. L’anarchisme sert de paravent à l’ultralibéralisme sous la forme réactionnaire de la doctrine libertarienne.
– La social-démocratie a quitté la voie de la révolution en participant aux gouvernements bourgeois à la fin du XIXè siècle, en approuvant les crédits de guerre en 1914. Sa doctrine réformiste qui prétendait accéder au socialisme en réformant le capitalisme ne pouvait être qu’un échec. Aujourd’hui le « socialisme » de la social-démocratie est une escroquerie et n’a rien à voir avec le socialisme de Marx et Engels.
Le réformisme classique s’est mué en une adhésion complète au programme de contre-réformes capitalistes impulsées par les institutions internationales et gouvernements au service de la bourgeoisie. Telle est la signification désormais du terme « réformisme ». Le masque est tombé. La social-démocratie est devenue une représentation bourgeoise.
– Le stalinisme restera dans l’histoire comme la pire trahison des idéaux du mouvement ouvrier. Par sa méthode, par le recours à la violence contre ses opposants dans le cadre du mouvement communiste, mais surtout par son programme : le socialisme dans un seul pays.
Pour le dire en quelques mots, le stalinisme aura été la manifestation de la contre-révolution au sein de l’URSS. Contre-révolution qui aura vu ses dirigeants liquider les conseils ouvriers et l’internationale communiste, combattre les mouvements visant à l’expropriation des capitalistes dans le monde. In fine le stalinisme aura posé les bases de la restauration capitaliste partout où ce mode de production avait été renversé.
Le stalinisme a sali le mot de « communiste ». Ceux de ses survivants qui ne sont pas devenus des oligarques multimilliardaires, les perdants de la restauration capitaliste, se coulent aujourd’hui dans le moule social-démocrate. Ils ne prétendent bien souvent qu’à de petites améliorations sociales du capitalisme, ce qui revient à défendre son existence même. Leur but : être élus et, surtout, être réélus.
La Quatrième internationale s’est constituée dans les pires conditions alors que la Seconde guerre mondiale approchait à grands pas. Malgré cela, malgré la nécessité de résister, dans ses conditions de guerre, à la répression du fascisme, du nazisme, du stalinisme et de la part de nombre de régimes « démocratiques », elle s’est maintenue.
Elle pouvait devenir une organisation de masse à l’échelle du monde. Mais elle a été détruite par le pablisme et le mandélisme dès les années 50. Eux qui ont trahi les ouvriers de Berlin-est en 1953, eux qui ont livré les révolutionnaires de la Brigade Simon Bolivar à la répression des sandinistes, au Nicaragua, en 1979.
La Quatrième internationale reste depuis à reconstruire, car il n’y a pas de programme révolutionnaire sans parti révolutionnaire. Le pablisme et le mandélisme ne reviendront pas en arrière sur leur orientation liquidationniste. C’est un fait et chaque jour qui passe le confirme.
On pourrait donner de nombreux exemples. Ainsi, dans les années 50 à partir de la Yougoslavie le discours du pablisme et du mandélisme quant à la soi-disant « double nature » de la bureaucratie stalinienne contre-révolutionnaire et « quand même » révolutionnaire. Leur positionnement en termes de « camps », plutôt qu’en termes de classes et le montage en épingle de soi-disant « marxistes naturels ». Tout cela a grandement contribué à semer la désorientation dans le mouvement ouvrier organisé.
Le confusionnisme qui est la base de l’orientation du pablisme et du mandélisme a eu pour conséquence de dépolitiser toute une génération après la chute du Mur de Berlin.
Mais surtout, le pablisme et le mandélisme portent une grande responsabilité dans la restauration, car ils ont brisé la IVᵉ Internationale et que cet outil irremplaçable à manqué aux travailleurs au moment crucial.
De nombreux courants qui ont tourné le dos à son programme prétendent s’en réclamer pourtant ou se trouvent à impulser aujourd’hui un programme de réforme « radicale » du capitalisme. Pire, à la remorque d’intellectuels « anarchisant » ils combattent aujourd’hui pour ne pas prendre le pouvoir !
Aussi nous le répétons et le répéterons : il ne suffit pas d’être ou de prétendre « anticapitaliste », il faut définir quel est l’objectif.
Pour nous, c’est le socialisme authentique, la propriété collective des moyens de production et d’échange à l’échelle du monde, la république universelle des conseils ouvriers. Pour y parvenir il faut que le prolétariat prenne le pouvoir et il nous faut l’y aider en construisant le parti mondial de la révolution socialiste.
L’effondrement du stalinisme a dégagé la voie pour la reconstruction de la IVᵉ Internationale et la révolution socialiste mondiale. Encore faut-il vouloir s’engager dans cette voie : mesdames et messieurs les cadres dirigeants des différents courants se réclamant de la IVᵉ Internationale, le voulez-vous ?
Comment faire quand on tourne le dos au prolétariat à l’instar de la social-démocratie ? Comment faire quand on quitte le terrain du social pour celui du sociétal ? Comment faire quand on a pour boussole un petit bourgeois comme M. Foucault qui ne cachait pas sa haine des prolos et sa fascination pour le libéralisme ?
Pourtant, quittant le terrain de la classe et de l’indépendance de classe, telle est l’orientation du soi-disant « secrétariat unifié de la quatrième internationale ». Et il cherche visiblement avec une certaine réussite à entraîner d’autres secteurs dans cette impasse.
La participation aux élections peut être une tribune pour s’adresser à la seule classe révolutionnaire pour accéder aux plus larges masses et pour construire le parti, elle ne peut pas être une fin en soi. De même les élus, quand il y en a, doivent-ils être strictement subordonnés à la base du parti dont ils ne sauraient s’en affranchir.
Or la dynamique de la social-démocratie, du stalinisme et du pablo-mandélisme est à l’opposé de cette conception, c’est l’électoralisme le plus plat qui pousse la logique du crétinisme parlementaire4 et de l’opportunisme politique à son maximum. Tout ça pour obtenir quelques postes, quelques élus qui, en définitives, soutiennent les institutions « républicaines » ou monarchistes. C’est l’essence même de la bureaucratisation du mouvement ouvrier.
Quelles perspectives ?
Il faut prendre le pouvoir pour changer le monde. Il est urgent que le prolétariat prenne le pouvoir et établisse le socialisme véritable sur les ruines du capitalisme. Le parti, l’internationale, doivent être, eux, reconstruits pour aider le prolétariat dans les moments décisifs de la lutte pour le pouvoir. La IVème internationale a été brisée en 1953, elle peut renaître par le travail opiniâtre de celles et ceux qui veulent réellement en finir avec le capitalisme.
Une condition sine qua non à ce travail de reconstruction : la rupture définitive avec le soi-disant « secrétariat unifié ». Or, aujourd’hui, trop de courants internationaux lui reconnaissent encore une légitimité malgré ses trahisons et ses compromissions ; trop de courants internationaux acceptent de se mettre à la remorque de ses lubies et de ses diversions petite-bourgeoises.
De même les conceptions nationales-trotskistes l’ont souvent emporté dans un contexte de dislocation de la IVᵉ Internationale : place à l’internationalisme prolétarien. On ne peut se prétendre « trotskiste » et théoriser l’isolement par rapport à la IVᵉ Internationale, prétendre construire un parti national avant de s’attaquer à la reconstruction de l’Internationale.
Maintenant que le bilan de la social-démocratie, du stalinisme, du pablo-mandélisme et de l’anarchisme ont pu être fait, il est urgent de reconstruire la IVᵉ Internationale. De nombreux militants qui restent à l’écart des organisations et partis qui ont tourné le dos aux principes sont prêts à se réunir et à agir dans ce sens, pour maintenir le fil de la continuité révolutionnaire. Ils sont les bienvenus !
Un programme pour le prolétariat, c’est un programme pour la prise du pouvoir. Pour se donner les moyens de réorganiser la société sur de nouvelles bases, pour remettre sur ses pieds ce monde qui marche sur la tête, dirigé par une ultra minorité d’une rapacité sans limites.
Un programme pour le prolétariat, cela ne peut pas être pas une addition de revendications individualistes, toujours plus « radicales » en apparence, mais toujours bien ancrées dans le monde capitaliste. Un programme pour le prolétariat cela ne peux pas être un programme pour la petite bourgeoisie.
Le programme de la IVe Internationale conserve toute son actualité. Il y a ceux qui s’en détournent ostensiblement, ceux qui le renient. Il y a ceux qui s’en réclament, mais qui s’en détournent dans les actes, dans la pratique. Il y a ceux qui le regardent comme l’objet d’un culte desséché. Il y a ceux qui cherchent à le faire vivre, à le faire entrer dans la réalité, à le mettre en pratique. Il y a aussi et surtout ceux qui cherchent une issue, un programme qui réponde à l’urgence de la situation.
Les bourgeois savent aussi se présenter comme progressistes, c’est d’ailleurs leur fond de commerce. Alors il faut choisir sa voie : ou le « progressisme », s’est-à-dire le réformisme plus ou moins radical et, en définitive, la contre-révolution ; ou bien la révolution, c’est-à-dire la construction du parti mondial de la révolution socialiste.
Répétons-le, la première bataille, c’est celle pour l’indépendance du prolétariat, pour rompre avec la bourgeoisie, avec le capital dans tous les domaines, pour l’organisation indépendante de la classe.
« Toutes les organisations opportunistes, par leur nature même, concentrent principalement leur attention sur les couches supérieures de la classe ouvrière, et, par conséquent, ignorent aussi bien la jeunesse que les femmes travailleuses.
Or l’époque du déclin capitaliste porte les coups les plus durs à la femme, tant comme salariée que comme ménagère. Les sections de la IVe Internationale doivent chercher appui dans les couches les plus opprimées de la classe ouvrière, et, par conséquent, chez les femmes travailleuses. Elles y trouveront des sources inépuisables de dévouement, d’abnégation et d’esprit de sacrifice.
À bas le bureaucratisme et le carriérisme ! Place à la jeunesse place aux femmes travailleuses ! Ce sont là des mots d’ordre inscrits sur le drapeau de la IVe Internationale. » (Programme de transition)
Les travailleurs, les femmes travailleuses, les jeunes, les militants, les groupes, organisations et partis attachés à l’idée que pour changer le monde, il faut prendre le pouvoir à l’échelle du monde sauront répondre à cet appel.
Le programme de la IVème Internationale n’est pas un ultimatum, il est la somme de l’expérience du prolétariat organisé, c’est pourquoi nous citons ici ses derniers paragraphes :
« La IVe Internationale jouit dès maintenant de la haine méritée des staliniens, des sociaux-démocrates, des libéraux bourgeois et des fascistes. Elle n’a ni ne peut avoir place dans aucun des Fronts populaires. Elle s’oppose irréductiblement à tous les groupements politiques liés à la bourgeoisie. Sa tâche, c’est de renverser la domination du capital. Son but, c’est le socialisme. Sa méthode, c’est la révolution prolétarienne.
Sans démocratie intérieure, il n’y a pas d’éducation révolutionnaire. Sans discipline, il n’y a pas d’action révolutionnaire. Le régime intérieur de la IVe Internationale est fondé sur les principes du centralisme démocratique : liberté complète dans la discussion, unité complète dans l’action.
La crise actuelle de la civilisation humaine est la crise de la direction du prolétariat. Les ouvriers avancés réunis au sein de la IVe Internationale montrent à leur classe la voie pour sortir de la crise. Ils lui proposent un programme fondé sur l’expérience internationale de la lutte émancipatrice du prolétariat et de tous les opprimés du monde. Ils lui proposent un drapeau que ne souille aucune tache. Ouvriers et ouvrières de tous les pays, rangez-vous sous le drapeau de la Quatrième Internationale ! C’est le drapeau de votre victoire prochaine ! » (Programme de transition)
1La République des sept provinces unies a fait sécession des Pays-bas espagnols, sous la domination des Habsbourg, en 1581.
2 C’est aussi le titre de la première partie d’une brochure de Rosa Luxemburg intitulée « La crise de la social-démocratie » – https://www.marxists.org/francais/luxembur/junius/rljaf.html
3 C’est le bilan que tire L.Trotski en introduction du « programme de transition », texte adopté au congrès fondateur de la quatrième internationale
4 « La force du marxisme, c’est qu’il sait voir la réalité. « Crétinisme parlementaire », dans la bouche d’un marxiste, n’est pas une injure, mais la caractéristique d’un système politique qui substitue, à la réalité sociale des constructions juridiques et morales, un rituel, des phrases décoratives. » (Crétinisme parlementaire et diplomatique – Léon Trotsky – juin 1933